Loi européenne sur le devoir de vigilance : Le Conseil donne son feu vert à un texte affaibli
Les ministres européens ont approuvé aujourd'hui une proposition législative qui rendrait les entreprises responsables des dommages qu'elles causent aux personnes et à la planète. Le Groupe de Travail Corporate Accountability, qui rassemble une vingtaine d’organisations de la société civile, salue cette avancée mais regrette que les États membres aient autant affaibli le texte.
À la suite de l’annonce faite par le Conseil, Joris Verschueren de la CGSLB a déclaré : « Aujourd'hui, les gouvernements européens ont affaibli un projet législatif novateur qui visait à mettre fin aux abus tout au long de la chaîne de valeur des entreprises. La proposition initiale de la Commission était déjà loin d'être la législation ambitieuse que la société civile attendait. La version du texte sur laquelle les États membres se sont mis d’accord aujourd’hui est encore plus faible et témoigne de la forte pression du lobby conservateur des entreprises. C'est une occasion manquée pour les femmes et les hommes qui travaillent dans le monde entier dans des conditions terribles pour fabriquer les produits que l’on retrouve dans nos rayons de supermarché ».
En matière de responsabilité civile, tout d’abord, les mécanismes permettant aux entreprises d'échapper à leurs obligations restent multiples. En ce qui concerne les investissements financiers, ensuite, les changements proposés par les ministres excluent certaines institutions financières et permettent ainsi à certains investisseurs de continuer à financer des projets pourtant dommageables aux droits humains et à l’environnement.
Pour ce qui est de l’accès à la justice des victimes des activités des entreprises, les règles édictées par les États membres n’ont pas remédié aux nombreux obstacles auxquels elles sont souvent confrontées lors de leur quête de justice. Le projet de texte est si favorable aux entreprises, qu’il est permis de douter de sa capacité à assurer l’accès à un recours et à des réparations aux victimes de ces dernières.
Enfin, les engagements environnementaux restent le parent pauvre de cette proposition législative, qui ne tient pas compte de la crise climatique.
Depuis que la Commission européenne a annoncé sa proposition en février 2022, le Parlement européen et le Conseil ont chacun travaillé sur leurs propres positions concernant la directive sur le devoir de vigilance. La décision d'aujourd'hui détermine la position du Conseil pour les négociations du trilogue, qui doivent commencer au printemps 2023.
Sophie Wintgens de la coupole CNCD-11.11.11 estime que tout n’est pas encore joué : « Il appartient maintenant à nos parlementaires européens de placer la barre plus haut. Ils doivent veiller à ce que les entreprises, y compris les banques et les investisseurs, soient tenus responsables des dommages qu'ils causent aux personnes et à la planète. Si les États membres souhaitent réellement s'engager en faveur d'un avenir durable et équitable, ils peuvent encore changer de cap. Il en va de même pour la Belgique. La Belgique est restée silencieuse tout au long des discussions. La société civile appelle la Belgique à plaider activement pour une directive plus ambitieuse au niveau européen. Des mesures peuvent également être prises au niveau national. Notamment, en adoptant la proposition de loi sur le devoir de vigilance qui a été déposée au Parlement fédéral belge ».
NOTES AUX Rédactions
- Le "Groupe de travail corporate accountability" rassemble une vingtaine d'organisations de la société civile belge, dont les deux coupoles 11.11.11 et CNCD-11.11.11, les trois syndicats belges (ACLVB-CGSLB, ACV-CSC, ABVV-FGTB) et diverses ONG et organisations de défense des droits de l'homme et de l'environnement.
- Des responsables de plaidoyer des différentes ONG sont disponibles pour tout commentaire supplémentaire :
- Marc Olivier Herman, Economic Justice Policy Lead chez Oxfam, via Sotiris Gassialis: 0494.13.56.78 (Sotiris.Gassialis@oxfam.org)
- Zoé Dubois, Chargée de plaidoyer chez achACT, zoe@achact.be, 0496.05.49.60
- Simon RIx, Chargée de plaidoyer chez Solsoc, srix@solosc.be, 0478.31.38.42