Séisme, inondations et insécurité aux Philippines : bilan de notre intervention humanitaire
En mai 2022, Oxfam et ses partenaires démarraient un programme humanitaire aux Philippines, visant à répondre aux effets de la crise climatique et de la situation sécuritaire dans l'île de Mindanao, qui font de l'archipel l'un des pays comptant le plus de déplacé.e.s internes au monde. Notre réponse s'est élargie à deux crises survenues en cours de route : le passage du typhon Paeng et son lot d’inondations ainsi qu'un séisme de magnitude 7.1 survenu il y a tout juste un an. Bilan de notre action commune, soutenue par l’Union européenne.
Le tremblement de terre qui a frappé l’île de Luzon dans le nord des Philippines en juillet 2022 était le plus puissant qu’ait connu le pays depuis de nombreuses années. Il a fait plus de 400 blessé.e.s, laissé 65.000 personnes sans abri sûr, abîmé des canalisations d’eau et causé des coupures d’électricité.
Lorsque la catastrophe s’est produite, les équipes d’Oxfam étaient mobilisées auprès de personnes déplacées par la spirale de violences qui sévit dans le sud de l’archipel. Elles ont atteint les zones sinistrées en moins de 24 heures et pu rapidement prodiguer une première aide d'urgence aux personnes rescapées.
Séisme : priorité au relogement
D’après nos évaluations, 24 270 maisons ont été endommagées dans la province d’Abra, épicentre du tremblement de terre. Notre principal défi a été de reloger un maximum de personnes sinistrées.
Mary Jane Perez était seule à la maison avec sa fille lorsque la terre a tremblé. « J'ai entendu de forts craquements, très brefs et puissants. Nous nous sommes immédiatement précipitées hors de la maison vers le jardin, quelques instants avant que le plafond ne s’effondre sur le rez-de-chaussée », se souvient-elle.
Oxfam et son partenaire Community Organizers Multiversity ont travaillé d'arrache-pied pour apporter de l'aide à la famille de Mary Jane. Elle a été relogée dans un abri temporaire, le temps que la maison familiale soit reconstruite. Sous le choc, Mary Jane et sa fille ont été suivies par nos travailleuses psychosociales, qui les ont aidées à surpasser leurs sentiments de détresse et d'anxiété, des symptômes post-traumatiques fréquents après ce genre de catastrophe. « Lentement mais sûrement, nous nous sommes remises de notre traumatisme », confient-elles.
Rétablir l’eau pour éviter la catastrophe sanitaire
La destruction de canalisations par le tremblement de terre a rapidement fait craindre une pollution de l’eau. En effet, les eaux usées et l’eau potable du robinet se sont mélangées.
Afin d’éviter des conséquences sanitaires pour les personnes sinistrées, nous avons distribué des articles d’hygiène, dont du savon, construit des douches et des latrines que nous avons éclairées (afin de renforcer le sentiment de sécurité et réduire les risques de violences de genre), réparé des canalisations endommagées et construit des bornes alimentant en eau potable près de 6 000 personnes.
Violentes inondations trois mois après le séisme
Trois mois après la catastrophe, la désolation a refait surface avec des inondations, notamment dans les zones déjà meurtries par le séisme. Une violente tempête tropicale a traversé l’archipel, de l'île de Luzon (au nord) à celle de Mindanao (à l’extrême sud), pendant la nuit du samedi 29 au dimanche 30 octobre, balayant tout sur son passage et faisant 164 victimes.
À nouveau, notre principal défi a été de fournir une aide d’urgence aux habitant.e.s des zones les plus frappées. Rien que dans l’île de Mindanao, les organisations partenaires d'Oxfam ont distribué de l'eau, des kits d'hygiène, des matelas et des couvertures à près de 6 000 rescapé.e.s, dont des centaines de personnes hébergées dans un lycée à Datu Odin Sinsuat, une ville côtière à l’ouest de l’île de Mindanao, particulièrement touchée par le cyclone (photo ci-dessous).
Soutenez nos interventions humanitaires
À tout moment, nos équipes humanitaires se tiennent prêtes à intervenir dans des situations d’urgence en apportant aux populations affectées eau potable, nourriture, services d’assainissement et protection.
Classé au 1er rang des pays les plus touchés par les phénomènes météorologiques extrêmes, l’archipel des Philippines est de plus en plus exposé aux tempêtes tropicales (25 cyclones s’abattent sur le pays chaque année) mais aussi aux sécheresses, qui touchent chaque année environ 74 % de ses 114 millions d'habitant.e.s.
Si les Philippines ne sont pas un important émetteur de gaz à effet de serre, elles font partie des pays les plus affectés par la crise climatique que ces gaz, produits ailleurs, engendrent à l’échelle de la planète. Au-delà de nos interventions humanitaires, nous plaidons aussi pour que les pays riches, qui caracolent en tête du classement des plus grands pollueurs mondiaux, compensent les pays les plus touchés pour les préjudices qu’ils subissent et qu’ils élaborent des plans d’action climatique suffisamment ambitieux afin de limiter le réchauffement global sous les 1,5 °C. C’est une question de justice climatique.
Des milliers de personnes toujours déplacées dans le centre du Mindanao
Une grande partie des 5,6 millions de personnes déplacées aux Philippines vit sur l’île de Mindanao, la plus riche en ressources minérales et agricoles, mais où, sept familles sur dix vivent sous le seuil de pauvreté. Au cours des quarante dernières années, la région a été marquée par des épisodes successifs de violences armées qui ont entraîné des pertes humaines et économiques considérables.
Notre programme s’est donc beaucoup concentré sur cette région. Nos partenaires Community Organizers Multiversity - CO Multiversity, IDEALS, Inc. et Bangsamoro Women Commission ont organisé des ateliers informant les personnes déplacées des droits dont elles bénéficient en tant que personnes exposées aux conflits, qui renoncent souvent à se tourner vers les services publics car leurs documents d'identité ont été détruits ou perdus.
Prise en charge de la reconstitution de documents d’identité
Les juristes de notre partenaire IDEALS se chargent justement de la reconstitution des documents d’état civil (tels que les cartes d'identité, les actes de naissance et les titres fonciers) détruits par les combats ou perdus au moment où les habitant.e.s ont pris la fuite.
Kudang Talilisen et ses cinq enfants ont été évacués à de nombreuses reprises en raison du conflit armé. « Notre maison à Penditen a été détruite lors d'une frappe aérienne menée par l'armée contre un groupe armé. Nos certificats de naissance ont tous disparu », se souvient-elle.
« Ce sont des documents importants. Ils prouvent notre identité et sont absolument nécessaires pour toute démarche administrative. Mais nous n'avions tout simplement pas les moyens d'entreprendre ces démarches seuls, les frais sont trop importants », nous a-t-elle confié.
L'ONG philippine a mis à disposition ses avocat.e.s et assistant.e.s juridiques afin d'aider Kudang Talilisen et plus de 1.700 autres personnes à recouvrer leurs documents. Elle et ses cinq enfants ont finalement obtenu des duplicatas de leurs actes de naissance.
Notre programme déployé aux Philippines a soutenu 30 000 personnes et a bénéficié du soutien financier de l'Union Européenne (Protection Civile et Opérations d'aide humanitaires européennes).
Photos : © Manman Dejeto/Oxfam