Mobilisation agricole : pour des prix justes et contre le libre-échange
Des agriculteur·rices restent en colère. Ce 13 novembre 2024 nos allié·es, la Fédération Unie de Groupements d’Éleveurs et d’Agriculteurs (FUGEA) et la Coordination Européenne Via Campesina (ECVC), descendent dans la rue avec la société civile pour réclamer encore une fois des réponses concrètes face à la crise du monde agricole. Nos allié·es se mobilisent face à la possible signature de l’accord de libre-échange entre l’UE et les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay), prévue lors du G20 à Rio le 16 novembre 2024.
Le libre-échange accentue les inégalités
Le libre-échange accentue les inégalités dans le secteur agricole, en mettant les agriculteur·rices du monde entier en concurrence avec l’agro-industrie. Dans le libre marché, les prix sont décidés au niveau mondial et cela tire les prix agricoles vers le bas au détriment des aspects sociaux et environnementaux. Ce type d’accords contredit les objectifs du Pacte vert européen et les recommandations issues du Dialogue Stratégique sur l’avenir de l’agriculture européenne.
Malgré les manifestations début 2024 et les promesses de la Commission européenne d’améliorer les conditions précaires des agriculteur·rices, de véritables réponses tardent à émerger. La Commission semble donner la priorité aux négociations d’accords de libre-échange, plutôt que de proposer des mesures concrètes pour améliorer les revenus et les conditions de vie agricole. Le Dialogue Stratégique semble n'avoir été qu'un moyen de maintenir les syndicats agricoles et la société civile occupés durant la période électorale.
des revenus toujours plus bas
En 2022, les revenus agricoles en Europe étaient inférieurs d’environ 40 % au salaire moyen de l’UE.Le monde agricole belge est caractérisé par une précarité persistante et des conditions de travail difficiles. En Belgique, 20 % des agriculteur·rices wallon·nes vivaient sous le seuil de pauvreté en 2024.
Le futur de l’agriculture européenne est à risque avec un véritable problème de reprise des fermes, souvent trop grandes et trop couteuses pour être reprises par la nouvelle génération. La faiblesse des revenus agricoles a entraîné la disparition d’environ 5 millions de fermes dans l’UE entre 2005 et 2020, principalement des petites exploitations.En revanche, la superficie des terres agricoles est restée stable. Ceci est en grande partie dû à l’absorption des petites exploitations par des structures plus grandes.
DES INEGALITES RENFORCEES AU NORD
La situation est encore aggravée pour les femmes et minorités de genre qui doivent faire face à de nombreuses inégalités, notamment l’invisibilisation de leur travail, une répartition inégale des charges domestiques, la surreprésentation des femmes sous le statut de conjointes aidantes, et le difficle accès à la formation, à la terre et aux credits, comme l’a révélé un rapport d’Oxfam.
De plus, les accords de libre-échange risquent d’aggraver les conditions de travail et de vie des travailleur·euse·s saisonniers immigrés en Europe. Déjà confronté·es à des conditions de travail précaires et souvent abusives, ces travailleur·euse·s bon marché deviendront encore plus vulnérables face à la pression accrue pour réduire les coûts et augmenter la compétitivité. La concurrence avec des importations soumises à des conditions de production différentes exerce déjà une forte pression sur les exploitations agricoles, les poussant à recourir à des pratiques de sous-traitance et à réduire les coûts, ce qui affecte directement les travailleur·euse·s saisonnier·ère·s. Jusqu'où ira cette logique destructrice ?
Si rien ne change, nous risquons d'assister à une précarisation croissante de l'ensemble du secteur, laissant les agriculteur·rices et travailleur·euses agricoles payer le prix fort d'un système de libre-échange qui ne leur offre aucune protection.
une situation encore plus critique pour les pays du sud
La situation est encore plus difficile pour les agriculteur·rices des pays du Sud qui fournissent le marché européen. En Côte d'Ivoire et au Ghana, où est produit une grande partie du cacao européen, jusqu'à 58 % des cultivateurs et cultivatrices vivent en dessous du seuil d'extrême pauvreté défini par la Banque mondiale, et 90 % n’atteignent pas un revenu décent. Cette tendance est encore plus marquée chez les femmes, qui forment la majorité des travailleur·euses agricoles dans ces régions.
De manière générale, les agriculteur·rices sont exposé·es à la volatilité des prix sur les marchés mondiaux, aux abus et aux violations des droits humains, tout en étant les plus affecté·es par les effets de la crise climatique. Sécheresses, inondations et dégradation des sols menacent les systèmes agricoles et la sécurité alimentaire, tandis que le soutien publique reste limité, voire inexistant, dans certains pays.
agir pour des prix justes
Comme le rappelle la FUGEA dans son communiqué de presse, assurer des prix justes aux agriculteur·rices étaient la principale revendication des mobilisations agricoles du début d’année.
La présidente de la commission européenne, Ursula Von Der Leyen, avait elle-même déclaré devant le parlement européen en juillet dernier : « Je veillerai à ce que les agriculteur·rices perçoivent un revenu équitable. Personne ne devrait être contraint·e de vendre de bons produits alimentaires à des prix inférieurs aux coûts de production ».
La promesse d'interdire l'achat de produits à un prix inférieur au coût de production était aussi présente dans la lettre de mission du nouveau commissaire à l’agriculture Christophe Hansen.
Plusieurs états membres comme la Belgique, l’Espagne et la France ont déjà légiféré dans ce sens. Pour tenir leurs engagements, les institutions de l’UE doivent garantir des prix et des conditions équitables pour le monde agricole au lieu de promouvoir le libre-échange. Comme l’exige ECVC dans son communiqué de presse, les prix payés aux agriculteur·rices doivent systématiquement couvrir les coûts de production et la PAC doit soutenir la transition vers des systèmes agricoles durables, ce qui permettrait au secteur agricole d’adopter des pratiques agroécologiques et de contribuer au maintien de la biodiversité. Oxfam demande la révision de la directive européenne sur les pratiques commerciales déloyales afin d’inclure une interdiction d'acheter à des prix inférieurs au coût de production durable, obligatoire pour tous les états membres.
Pour rejoindre la mobilisation rendez-vous à 11h . Discours des organisations agricoles (FUGEA, ECVC), ainsi que de leurs allié.es de la société civile. Prise de paroles d’eurodéputés et rencontres politiques.
Pour plus d’information concernant les réponses, contactez les personnes ci-dessous.
Pour plus d’information sur la mobilisation agricole, veillez contacter :
- Philippe Duvivier (président) : 0491 56 33 86
- Hugues (porte-parole) : 0497 6164 14
- Timothée Petel (point de contact presse) : 0499 90 75 92