Camp sahraoui Algérie
Actualité29 mars 2024

Camps de réfugiés sahraouis : le défi de l’eau en plein désert

En exil depuis 1975, plus de 170 000 réfugié.es Sahraoui.es vivent dans cinq camps situés dans l’ouest algérien. Les plus jeunes n’ont jamais vu le Sahara Occidental, leur patrie, mais tou.tes rêvent d’y retourner un jour. L’un des plus grands défis auxquels iels sont confrontés dans le désert inhospitalier qui les accueille depuis près de 50 ans est l’accès à l’eau. Oxfam, avec le soutien de l’UE, poursuit la construction d’un vaste réseau d’eau à Boujdour, l’un des cinq camps sahraouis situés en Algérie.  

Dans un quotidien fait de privations, ce sont actuellement plus de 170 000 Sahraoui.es qui vivent en territoire algérien dans cinq camps entièrement dépendants de l’aide internationale. L’un d’entre eux, Boujdour, est le dernier camp à être presque entièrement ravitaillé en eau par camions-citernes, un système inefficace et coûteux.

Les camps de réfugiés sahraouis face au défi de l’eau

Afin d’assurer un meilleur accès à l’eau aux 16 400 habitant.es de Boujdour, Oxfam a entamé la construction d’un réseau d’eau en 2022. Le vaste chantier toujours en cours, réalisé en collaboration avec la DG à la protection civile et des opérations d’aide humanitaire européennes, inclut la construction de deux châteaux d’eau d’une capacité de 320 mètres cubes chacun, la réalisation d’un réseau de canalisations de 70 kilomètres de long et l’installation de 400 robinets publics.

À l’heure actuelle, les ingénieures et ingénieurs hydrauliques d’Oxfam sont attelées à la construction d’un deuxième tronçon d’une longueur de 17,7 kilomètres (après avoir finalisé le premier tronçon l’an dernier), dont l’objectif est de desservir plus de 7500 personnes via 131 robinets publics. Le chantier est titanesque quand on sait que le camp, situé à quelques encablures de la petite ville algérienne de Tindouf, se situe dans l’un des déserts les plus inhospitaliers au monde, dans lequel la température peut atteindre jusqu’à 50° C. L’objectif ultime étant que Boujdour ne soit plus dépendant des camions citernes et de permettre aux familles de s’alimenter en eau de manière autonome et sur le long terme.

Or, c’est bien de solutions à long terme dont ont besoin les Sahraoui.es qui ont fui le Sahara Occidental il y a quarante-neuf ans pour s'installer dans un désert de sable et de rocaille dans l’ouest de l’Algérie. Des dizaines de milliers de personnes – 174 000 d’après le haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies (UNHCR) – ont pris l'exil à la suite d'un conflit qui oppose le Front Polisario et le Maroc depuis 1975 et survivent depuis lors grâce à l’aide humanitaire. Elles sont dispersées dans cinq camps qui portent tous un nom en référence à une localité du Sahara Occidental, inscrit sur la liste des territoires non-autonomes (dont la décolonisation n'est pas terminée) établie par l'ONU, qui soutient l'organisation d'un référendum d'autodétermination. Le manque d'hygiène et la rareté de l'eau y sont des sujets de préoccupation majeurs pour Oxfam et c'est ce qui nous a amené à entamer des travaux de grande ampleur.

Les châteaux d’eau permettent déjà de stocker l’eau de pluie et contribueront à alimenter 8.200 personnes toute l’année, soit la moitié de la population du camp. Quant au réseau de distribution, il acheminera l’eau traitée après avoir été puisée dans les nappes phréatiques présentes dans la région vers des robinets publics, tous disposés à proximité des habitations. Les familles ne devront parcourir qu’une distance maximale de 150 mètres afin de pouvoir s’alimenter à un point d’eau. Plusieurs sessions d'informations ont déjà eu lieu dans les "barrios" de Boujdour afin d’informer la population des futurs avantages du réseau.

L’espoir renaît dans les barrios dU CAMP DE Réfuigés SAHRAOUI de Boujdour

En moyenne, une famille consomme environ 100 litres d'eau par jour pour couvrir ses besoins de base liés à la consommation (boire et cuisiner), à l’hygiène (propreté personnelle et domestique) et parfois pour couvrir les besoins du bétail pour les familles qui possèdent des moutons. D’après les enquêtes menées par les équipes d’Oxfam dans le camp de Boujdour, la consommation en eau par personne avoisine les 14 litres par jour, bien en-deçà de la quantité minimale d’eau que le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, considère être le strict minimum, soit 20 litres.

Zarga Hamdi, une habitante du camp sahraoui de Boujdour fait le plein d'eau au réservoir du quartier

Tou.tes les habitant.es du camp de Boujdour que nous avons rencontré.es sont unanimes : iels manquent d’eau et sont dépendant.es du passage de camions-citernes pour remplir leurs réservoirs.  

« Le problème avec ces camions », explique Zarga Hamdi, une habitante du barrio (quartier) de Lemsid à Boujdour, et responsable de la gestion de l'eau du quartier, « c’est qu’ils sont très lourds et inadaptés aux routes en milieu désertique. De plus, ils tombent fréquemment en panne, consomment beaucoup de carburant et ont régulièrement besoin d’être entretenus, alors que les pièces de rechange sont difficiles à obtenir ». En effet, si la distribution d’eau potable par camion convient parfaitement en situation d’urgence, elle représente un coût démesuré sur le long terme et s’avère inefficace.

Fati Mahmoud, une habitante du barrio 4 fait le même constat et évoque les stratégies d’adaptation qu’elle est obligée de mettre en place lorsque l’eau vient à manquer : « Quand nous sentons que nous sommes sur le point de manquer d'eau, nous réduisons nos activités afin de conserver l'eau le plus longtemps possible. Par exemple, nous reportons parfois la lessive jusqu'à ce que l'eau soit disponible. Nous sommes souvent contraintes d’acheter de l’eau en bouteille pour pallier les manques, mais ce n’est évidemment pas toujours possible », dit-elle.

Fort heureusement, les travaux avancent bien. Et de nombreuses familles, considérées comme prioritaires, ont déjà accès à plusieurs parties de tronçon mises en service. Zarga Hamdi explique : « Avant d’installer les robinets, nous avions aussi veillé à identifier les familles les plus vulnérables économiquement parlant, celles qui comptent le plus de personnes âgées ou à mobilité réduite et les avons placées le plus près possible de leurs maisons. Nous voulons vraiment garantir un accès égal et universel à l'eau à chaque personne dans le camp. Aujourd’hui, ces familles ne sont plus obligées de parcourir de longues distances pour atteindre un robinet, tout a été pensé au préalable avec elles », conclut-elle.

OXFAM DISPENSE DES formations pour une meilleure hygiène

Nous travaillons également en étroite collaboration avec le département de l’eau sahraoui afin de mieux identifier les familles qui n’ont pas les moyens de se procurer ou d’entretenir leurs réservoirs d’eau de manière optimale et ainsi éviter l’accumulation de micro-organismes. Nous leur avons distribué des réservoirs conformes aux normes d'hygiène et fourni les détergents nécessaires.

Des activités de sensibilisation à l’hygiène ont été dispensées auprès des communautés et dans les écoles du camp. 39 bénévoles de santé communautaire ont été formés dans le but d’organiser des sessions portant sur l'hygiène personnelle, le lavage des mains, le nettoyage des réservoirs et le traitement de l'eau.

Dans les écoles, ces bénévoles ont organisé des initiations au lavage des mains. En effet, le manque d’accès aux produits d’hygiène y augmente les risques de transmission de maladies.

Les informations que j'ai reçues au cours des séances d'hygiène sont comme un trésor pour moi

Mulai, un adolescent de 15 ans, a suivi un cycle d’initiations au cours desquelles il a appris à se laver régulièrement les mains avec du savon aux moments critiques ou encore boire de l'eau potable qui a été collectée, traitée, stockée et récupérée correctement.

« Les informations que j'ai reçues au cours des séances d'hygiène sont comme un trésor pour moi », raconte-t-il, enthousiaste. « J’ai hâte de partager tout ce que j’ai appris avec ma famille », conclut-t-il. En effet, les enfants peuvent également exercer une influence sur la promotion de l'hygiène à la maison avec leurs frères et sœurs et leurs parents.

Enfin, nos efforts pour améliorer l’approvisionnement des habitant.e.s de Boujdour en eau potable par canalisations vont aussi réduire les risques pour la santé. Les familles ne seront bientôt plus obligées de stocker l'eau dans des réservoirs en plastique de mauvaise qualité, qui augmentent le risque de contamination de l'eau.

La seule issue à la question du sahara occidental doit passer par un processus de paix négocié et juste

Les réfugié.es sahraoui.es vivent de l'aide internationale, notamment de l'Union européenne, et dépendent du soutien des agences onusiennes et des ONG comme le HCR, le PAM, Oxfam ou encore le Croissant Rouge. Un référendum d'autodétermination prévu par l'accord de cessez-le-feu de 1991 n'a jamais été mis en œuvre. Isolé.es depuis des décennies, loin des regards de l'opinion internationale, de nombreux Sahraoui.es continuent d’espérer un retour sur leurs terres. Oxfam se fait l’écho de l’appel des Nations unies pour une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable incluant l’autodétermination du peuple sahraoui.

Apprenez-en plus à propos de la compléxité du défi de l'eau dans les camps sahraouis dans ces Trois questions posées à l'ingénieur hydrique qui a supervisé les travaux à Boujdour l'an dernier.

Ce projet a bénéficié du financement de la Direction générale pour la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes de la Commission européenne (ECHO).

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Soyez solidaires avec les personnes réfugiées à travers le monde

Oxfam se mobilise pour la protection et la défense des droits des personnes réfugiées en mettant en place des programmes WASH (Water, Sanitation, Hygiene), en fournissant un soutien juridique ou en apportant un soutien en espèces ou en bons alimentaires.

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