Communiqué de presse7 juin 2022

800 % d’augmentation des besoins financiers humanitaires liés à des catastrophes climatiques extrêmes ces 20 dernières années

Dans un nouveau rapport publié aujourd’hui, Oxfam révèle que les financements nécessaires dans le cadre des appels humanitaires de l’ONU liés à des événements climatiques extrêmes (inondations, sécheresses) sont aujourd’hui huit fois plus importants qu’il y a 20 ans. Et pourtant les contributions des pays donateurs ne suivent pas. Seulement la moitié de ces appels humanitaires de l’ONU pour les urgences climatiques a été financée au cours des cinq dernières années.

Les besoins de financement annuels liés aux événements climatiques extrêmes s’élevaient en moyenne à au moins 1,6 milliard de dollars entre 2000 et 2002, contre une moyenne de 15,5 milliards de dollars entre 2019 et 2021, ce qui représente une augmentation de 819 %.


Depuis 2017, les pays riches responsables de la plupart des conséquences actuelles des changements climatiques n’auraient apporté que 54 % des sommes demandées par ces appels, soit un déficit d’environ 33 milliards de dollars.


Les pays qui enregistrent le plus d’appels humanitaires liés à des catastrophes climatiques extrêmes (plus de dix chacun) : sont notamment l’Afghanistan, le Burundi, la République démocratique du Congo, Haïti, le Kenya, la Somalie, le Soudan du Sud et le Zimbabwe et dans la région du Sahel, le Burkina Faso, le Tchad et le Niger.


D’après le rapport intitulé « L’heure des comptes », l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques extrêmes accroit les pressions qui s’exercent sur un système humanitaire déjà débordé et sous-financé. Par ailleurs, les coûts occasionnés par les dommages liés aux tempêtes, aux sécheresses et aux inondations aggravent les inégalités. Les populations les plus pauvres sont les plus touchées alors qu’elles n’ont pas les moyens financiers ni les structures dont disposent les pays plus riches pour faire face à ces catastrophes. Les 1 % les plus riches du monde émettent deux fois plus de CO2 que la moitié la plus pauvre de l’humanité.


Les appels de l’ONU portent sur les besoins humanitaires les plus urgents, mais ils ne couvrent qu’une part infime du coût réel des pertes et des dommages que les changements climatiques infligent à l’économie mondiale.


Le coût économique des événements climatiques extrêmes au niveau mondial est estimé à 329 milliards de dollars pour la seule année 2021, soit le troisième bilan le plus lourd jamais enregistré. Ce montant représente près du double de l’aide totale versée par les pays riches aux pays en développement cette même année.


Le montant des pertes et des dommages subis par les pays à revenu faible et intermédiaire pourrait s’élever à un total annuel compris entre 290 milliards et 580 milliards de dollars. Cela implique par exemple les coûts liés à la reconstruction de maisons et d’hôpitaux, la mise en place de centres d’accueil, la distribution de denrées alimentaires et des transferts monétaires d’urgence à la suite des cyclones. Ces estimations ne prennent pas en compte les pertes non économiques comme les décès, les pertes culturelles, la dégradation des modes de vie et les atteintes à la biodiversité.


Les appels de l’ONU ne couvrent que très partiellement les coûts économiques liés aux catastrophes climatiques et n’atteignent qu’une fraction des victimes. Le rapport d’Oxfam montre que ces appels ont permis de couvrir 474 millions de personnes sur les 3,9 milliards de personnes touchées par des catastrophes climatiques extrêmes dans les pays en développement depuis 2000, ce qui représente un huitième de la population concernée.


 « L’activité humaine a déjà entraîné un réchauffement climatique de 1,1 ˚C par rapport à l’ère préindustrielle, et nous en payons maintenant les conséquences. Plus alarmant encore : les projections actuelles indiquent que nous allons bientôt dépasser le seuil de 1,5 ˚C. Le bilan des dommages climatiques continuera de s’alourdir. Si nous ne réduisons pas nos émissions de carbone, l’humanité fera face à des conséquences dévastatrices. Nous ne pouvons ignorer les pertes et les dommages considérables qui en résultent : pertes de vies, de maisons, d’écoles, d’emplois, de terres, de culture, de savoirs autochtones et locaux, et de biodiversité », déplore Gabriela Bucher, directrice générale d’Oxfam International.


« C'est le chaos climatique contre lequel nous mettons en garde depuis longtemps. De nombreux pays qui subissent les conséquences les plus graves des changements climatiques sont déjà confrontés à des crises comme les conflits, l’inflation alimentaire, et les répercussions économiques de la pandémie de COVID-19. Cette conjonction de facteurs entraîne un accroissement rapide des inégalités, des déplacements de masse, de la faim et de la pauvreté ».


Les catastrophes humanitaires n’ont pas les mêmes effets sur les hommes et les femmes, touchées par des inégalités de longue date qui diminuent leur capacité de résilience. Les droits des femmes et les progrès en matière d’égalité des genres sont menacés à chaque catastrophe. D’après le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), 80 % des personnes déplacées en raison des changements climatiques sont des femmes.


« On ne peut exiger des pays pauvres de payer la facture climatique et l’augmentation de l’aide, bien qu’utile, n’est pas suffisante. Le paiement des pertes et des dommages liés au climat doit se faire sur la base de la responsabilité, et non de la charité. Les pays riches, les individus les plus riches et les grandes entreprises sont les premiers responsables des changements climatiques et doivent à ce titre payer pour les torts qu’ils causent », estime Gabriela Bucher.


Les pays riches sont à l’origine d’environ 92 % des émissions historiques excédentaires de CO2 et de 37 % des émissions actuelles. A titre de comparaison, tout le continent africain n’est responsable aujourd’hui que de 4 % des émissions mondiales.


Cela fait des années que les pays industrialisés bloquent les négociations relatives au financement des pertes et des dommages. Lors de la COP26 à Glasgow, ils ont rejeté la demande des pays en développement de mettre en place un dispositif de financement pour faire face aux pertes et dommages et l’ont remplacée par un Dialogue de Glasgow sur trois ans pour discuter des modalités de financement. « C’est scandaleux », conclut Gabriela Bucher.


À l’approche des intersessions de Bonn, qui constituent également le premier Dialogue de Glasgow sur les pertes et les dommages depuis la COP26, Oxfam fait les recommandations suivantes :

  • Les pays riches doivent s’engager à mettre en place un financement bilatéral des pertes et des dommages qui s’ajoutera aux financements climatiques actuels et aux engagements d’aide public au développement (APD).

  • Tous les gouvernements doivent créer et financer un dispositif de financement pour les pertes et les dommages lors de la COP26, sur la base de contributions annuelles fondées sur leur responsabilité historique et leur capacité économique.

  • Tous les États doivent s’engager à faire des pertes et des dommages un élément fondamental du Plan d’action du CCNUCC pour les questions de genre.

Notes aux rédactions

 

 

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