L’hydroponie pour nourrir le bétail dans des environnements difficiles
L’hydroponie consiste à faire pousser des plantes sans sol ou terreau. Les racines des graines de céréales germées sont immergées dans un mélange d’eau et de nutriments. Grâce à cette méthode, il ne faut que 9 jours pour obtenir du fourrage vert pour les animaux. Une technique éprouvée, mise en place par Oxfam au travers de plusieurs projets dans des endroits où il était compliqué de nourrir les animaux.
Un projet-pilote réussi dans les camps Sahraouis
Les premiers tests d’hydroponie ont lieu en 2016, dans les camps de réfugiés Sahraouis, au sud de l’Algérie. Après avoir étudié plusieurs solutions avec divers partenaires belges comme l’Université de Liège, Oxfam opte pour une méthode « low tech » : la production hydroponique dans des constructions en terre cuite en forme de dôme.
Ce système ne nécessite pas d’équipements élaborés, de connaissances préalables, de nutriments spécifiques ou de lumière additionnelle. Les dômes sont construits avec des matériaux simples, peu coûteux, facilement accessibles dans cette zone du Sahel. Une formation de quelques semaines est suffisante pour apprendre à les construire et à les entretenir.
Grâce à ce projet soutenu par le Programme Alimentaire Mondial (PAM) et épaulé dans les camps par l’Union des Femmes Sahraouies, les petits bâtiments blancs fleurissent dans un premier camp, puis dans 5 autres au cours des années qui suivent.
Devant le succès rencontré par ce projet, c’est ensuite au Niger, au Tchad et au Burkina Faso que nous introduisons l’hydroponie pour la nutrition animale en 2017 et 2019. En 2019, la Faculté Agro-Bio Tech de Gembloux rejoint le projet et l’hydroponie est introduite à Gaza et en Cisjordanie.
Animaux en meilleure santé et populations mieux nourries
L’hydroponie permet de produire une nourriture riche pour le cheptel tout au long de l’année, dans une région désertique avec un apport en eau minimum. Cette technique consomme en effet 30 fois moins d’eau qu’une culture en sol.
Depuis que les animaux peuvent manger du fourrage frais, leur santé s’est clairement améliorée. La production de lait a augmenté de 20 %. Sa qualité nutritionnelle, ainsi que celle de la viande, ont augmenté de 20 à 40 %. Les réfugié.e.s peuvent désormais compléter les « paniers secs » (riz, farine, blé) de l’aide alimentaire du PAM avec des protéines fraîches.
La production de lait a augmenté de 20%
Avant, j’avais énormément de difficulté à nourrir mes bêtes. Quand je laissais mes chèvres sans surveillance, elles mangeaient des déchets pour compenser. Désormais je peux les nourrir chaque jour et même partager le fourrage avec d’autres personnes. Kadiha Abdelfatah Mohamed, éleveuse sahraouie
Des communautés revitalisées au Tchad
Au Tchad, l’introduction de l’hydroponie a eu lieu dans un contexte assez différent. Ici pas de conditions désertiques, mais des populations forcées de fuir leur maison et leur région à cause du conflit contre le groupe Boko Haram. Depuis 2016, Oxfam y mène une réponse humanitaire en mettant l’accent sur la reconstitution des moyens d’existence de ces populations.
Parmi les solutions proposées figure la distribution d’un cheptel de petits ruminants à des familles vulnérables afin de lutter contre la malnutrition et d’améliorer leur niveau de vie. Mais cela implique de pouvoir nourrir les animaux. Sans fourrage à disposition, pas d’autre choix que de les laisser vagabonder avec tous les risques que cela comporte : vol, blessure, mauvaise alimentation…
La solution de l’hydroponie s’est imposée d’elle-même. Elle se base ici sur une technique différente que celle utilisée dans les camps Sahraouis. Il s’agit d’unités de production individuelles très simples composées d’une boîte contenant 4 plateaux de germination. Grâce au fourrage produit, les animaux peuvent être nourris en enclos et sont moins exposés aux risques décrits plus haut.
Les bénéfices vont plus loin que la « simple » fourniture de nourriture pour les animaux. L’élevage est en effet aussi au centre de la vie économique et sociales de nombreuses communautés. La vente ou le troc de bétail et de produits animaux génèrent des revenus et permettent de se procurer d’autres aliments et des produits de première nécessité. Et ce secteur crée aussi de nombreux emplois directs : marchands, chevillards, bouchers, tanneurs, etc.
Une solution simple et flexible
A l’opposé des projets classiques de distributions alimentaires, l’hydroponie permet aux communautés de travailler elles-mêmes à leur subsistance et devenir un peu moins dépendantes d’une aide externe. Elle s’adapte à différents milieux et contextes, nécessite peu de moyens et donne des résultats rapides. Pour les centaines de familles impliquées dans nos projets, l’hydroponie est le germe d’une vie meilleure, au propre comme au figuré.